

par Florence Lotterie et Clara de Courson
France met. & monde : 3€ jusqu'à 25€, 6€ jusqu'à 50€, 9€ jusqu'à 100€, 12€ au-delà 100€ DOM-TOM : 8€
Fiche technique
Introduction 15
REPÈRES
Les circonstances de rédaction
Au temps des luttes philosophiques 23
Une gestation au long cours 23
• Brève histoire du texte
• Une conception par “lambeaux” ?
• La “plaisanterie” et le sérieux
Pour la postérité 36
• Un nouveau Socrate ?
• 1760-1782 : de la circonstance actuelle au “concert lointain”
Un roman sur fond de crise religieuse 45
Ni janséniste, ni moliniste 45
• Le philosophe et les convulsionnaires
• De la théologie à la politique
Composition romanesque et archétype conventuel 54
• Une chronologie symbolique
• Poétique de la répétition : une arme de la satire
Diderot face au roman
le défi de l’illusion romanesque 69
La vraisemblance comme problème 69
• Aventures trop chimériques 69
• Sortir du romanesque, entrer dans la vie ?
• Le vrai et le vraisemblable (I)
La religieuse sans amour 84
• Le rapport aux traditions libertines
• Religieuses amoureuses et vœux forcés
Les modèles de l’expérience 97
La pratique épistolaire 97
Le laboratoire dramaturgique 101
• La scène et le tableau : comment être “intéressant” ?
• La ressource picturale : le romancier en critique d’art
Le moment Richardson : le roman et ses fantômes 109
• Le paradigme spectatoriel
• Le vrai et le vraisemblable (II)
PROBLÉMATIQUES
De la mystification au roman : lire un “tout organique”
Les corrections de 1780-82 : affirmer le romancier 115
L’auteur et ses doubles 115
• “M. Diderot”
• Une fiction de l’éditeur ?
L’estompage de l’univers référentiel 126
Enjeux du modèle mystificateur 128
Mystification ou persiflage ? 128
• L’amitié trompée ou le danger du rire immoral
• Discours artificieux
Détruire l’illusion ? 131
La satire du simulacre religieux 135
• Enfants de Bélial : contre la “langue des couvents”
• Dispositifs cérémoniels : les mystificateurs mystifiés
La greffe du roman familial 141
La famille décomposée 141
Contre la fable de l’enfant trouvé : féeries sans lendemain 142
Une exemplarité réorientée 147
Les équivoques du roman-mémoires
Logiques du récit 153
Faut-il parler de “bévues” ? 153
Le traitement du double registre 156
• Les contrariétés de l’expérience
• L’effet de présence
Ambivalences du pathétique 161
Le modèle confessionnel 161
• Fiction de la transparence
• Érotisations
Opacités de l’expérience sensible 164
• Altérations modales : la focalisation
• Limites expressives et expression des limites
Dire l’indicible 172
• La scansion visuelle
• La scansion musicale
Oppressantes clôtures
Le récit cellulaire : entre les murs 177
L’espace labyrinthique 177
L’intimité : zones à défendre 178
Rester vertical 181
Espaces pervertis 183
Le roman médical 185
Atteintes à “l’économie animale” 185
• Une histoire de l’épuisement physique
• États dissociés : l’habit ne fait pas la nonne
L’aliénation comme diagnostic 190
Contagions et innocuités 194
Volontés de (non) savoir 201
La psyché obscure 201
Le couvent comme “royaume de Mangogul” 205
• Stratégies de résistance à l’inquisition religieuse
• D’un viol à l’autre ?
La fabrique des monstres 214
• Le corps docile : impersonnalisations
• Les “bêtes féroces” : un défaut de la machine ?
Le roman politique : “je demande à être libre”
La scène judiciaire 221
Les droits de la défense 221
• Justification et réhabilitation
• Liberté d’expression
Suzanne et l’éloquence de la justice 228
• Raison des Lumières et transparence judiciaire
• Le roman philosophique : liberté et pacte social
Les limites de la publicité 238
Scrupules de la vertu et impasses du scandale 238
Où est le “tribunal de l’opinion” ? 239
• La plaidoirie impossible
• Le paradoxe de Suzanne : écrire pour disparaître
• La part tragique
LE TRAVAIL DU TEXTE
Lexicologie
Quelques procédés de formation lexicale 253
La dérivation 253
• Le préfixe -re
• Préfixes négatifs, privatifs ou inversifs
La conversion 257
• Infinitifs substantivés
• Adjectifs substantivés
Le lexique en transparence 258
Un lexique sans relief ? 258
L’air du temps lexical 259
Le savoir des mots 261
• Société
• Concepts
• “Scènes” romanesques
“Tout cela n’est peut-être pas vrai, mais c’est ce que je sens” : le lexique du sentiment 263
Amour et amitié : les liaisons dangereuses 264
Passion, émotion, sensation, sens, sensibilité 264
Le sentiment, corps et âme 266
• Sentir
• Sentiment
• Ressentiments, pressentiments
• Traces intertextuelles
Grammaire
Quelques faits de langue classique 271
L’auxiliation 272
Les subordonnants 272
• Que
• Dont
• Si
• Quand
L’emploi des temps 274
La montée du pronom clitique 274
L’inversion du sujet 275
L’interrogation 275
Autres types de phrases 277
• Propositions indépendantes
• Propositions subordonnées
• Propositions incises et incidentes
• Propositions juxtaposées
Le déterminant zéro 280
Déterminant zéro comme marqueur d’extension constante 280
En emploi référentiel 280
En emploi non référentiel 281
• Attribut
• Apposition
• Complément
Les constructions détachées 282
Apposition nominale 283
Épithète détachée 283
Groupes participiaux 284
• Participe apposé
• Gérondif
• Constructions absolues détachées
À la marge des constructions détachées 288
Les emplois du mode subjonctif 289
En indépendante ou en principale 290
• Injonction
• Souhait
En subordonnée 290
• En relative
• En complétive
La modalité de phrase 292
• En circonstancielle
• Temporelles
• D’opposition
• Concessives
• Hypothétiques
Les périphrases verbales 295
Périphrases temporelles 295
• Expression du futur
• Expression du passé
Périphrases aspectuelles 296
Périphrases modales 296
• La volition
• Le vraisemblable
• Le probable et l’éventuel
• L’exclu et la défense (l’auxiliation extraordinaire)
Les périphrases actancielles 297
Les formes pronominales 298
Pronom analysable comme objet :
les constructions pronominales réfléchies 298
• Verbes réflexifs
• Verbes réciproques
Pronom inanalysable comme objet 299
• Les verbes essentiellement pronominaux
• Les verbes pronominaux autonomes
• Les constructions neutres ou autocausatives
• Les constructions pronominales de sens passif
Cas atypiques 301
Stylistique
“Les autres et moi” 303
Formes de l’adresse 303
• Mystifications scénographiques
• Suzanne délocutée
Pouvoirs du on 306
• Premiers rôles
• Groupes flous
• Le pronom ennemi
• Brouillages pronominaux et tropes communicationnels
Agents fantômes 312
• Constructions impersonnelles
• Diathèse passive
• Proposition infinitive sans agent exprimé
Un autoportrait énonciatif 316
Marques de la subjectivité 316
• Première personne 316
• Passé composé
• Déréglages déictiques
• Subjectivèmes
• Marqueurs d’intensité
• Pathèmes
Facettes de l’ethos narratorial : naturel, ignorance, dispersion 330
• Figures de l’improvisation
• Ethos d’ignorance
• Réaiguillages phrastiques et mauvaise foi
• Anacoluthes et fautes de langue
• Dyschronie
• Cependant : la connexion désagrégative
Réarrangements communicatifs et mimétique de l’oralité 338
• Phrases à présentatif
• Procédés d’emphase
• Tours interrogatifs en est-ce que
L’art du récit 346
• Métaphores et comparaisons
• Présent de narration
• Sentences romanesques
La représentation des discours autres 352
Le discours direct en trompe-l’œil 353
• Champs de forces du dialogue
• Rhétorique de l’attribution
• Mirages du DD
• Imparfaits attributifs
• Guillemetage et saillance énonciative
Le discours narrativisé : anatomie de l’émotion discursive 370
• Valeur élucidante
• Valeur fragmentaire
• Valeur émotive
Le discours indirect : énonciations suspectes 378
• Discours indirect et anaphore conjonctionnelle
• Dysfonctionnements discursifs
Le discours indirect libre : l’insinuation conjurée 381
• Incorporation énonciative
• Insinuations
La phrase diderotienne 384
Le style coupé 384
• Phrases à poutres apparentes
• Vivacité et compacité
• Éléments de définition du style coupé
• Épargne et cohésion phrastiques
• Phrases enfiévrées
Pièces de liaison syntaxique 391
• Coordination : la liaison miniature
• Rhétorique de la répétition
• Corrélations isomorphes : ordonner l’instable
Conclusion 403
Bibliographie
Étude littéraire 405
Étude de la langue 411
L’année 1760 est, pour Diderot, celle d’une mise en retrait de la sphère publique : il se fait discret. C’est aussi le moment où il confie systématiquement ses textes à la Correspondance littéraire de Grimm, vouant à une diffusion manuscrite et très restreinte les grandes œuvres qui ont fait sa célébrité posthume : les contes, les romans, Les Salons, Le Rêve de d’Alembert… Le périodique constitue pour Diderot un refuge paradoxal, à la fois protecteur et révélateur des limites désormais posées à sa reconnaissance d’écrivain. La Religieuse, que la violence de la charge anti-monastique rend “impubliable” [Chouillet, 1977, p. 180], s’écrit dans le contexte de cette restriction à la fois volontaire et forcée par des circonstances qui incitent à la prudence : Diderot se souviendra toujours d’avoir été emprisonné quelque temps à Vincennes pour avoir publié la Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient (1749). C’est aussi là que se noue la relation puissamment identificatoire du romancier avec sa créature de papier, son double en victime de la persécution.